La reprise de la Grèce après la pandémie a été plus dynamique, le pays progresse dans la mise en œuvre de réformes ambitieuses.
- Le gouvernement sortant de la Nouvelle Démocratie a remporté les élections de juin et poursuit son programme de réformes.
- Après une récession plus profonde que celle de la zone euro pendant la pandémie, une reprise plus dynamique s'est amorcée.
- Le taux d'endettement de l'État reste élevé, mais il est en baisse. La prudence budgétaire régnant, un retour à une notation de qualité est en vue.
- Le secteur bancaire s'est amélioré, même si des incertitudes subsistent, en particulier des prêts non productifs élevés.
La Nouvelle Démocratie remporte une nouvelle victoire
Le premier Ministre, Kyriakos Mitsotakis, et son parti de centre-droit, Nouvelle Démocratie (ND), ont remporté les élections générales en mai dernier. Après avoir échoué à élire un gouvernement, la Grèce s'est à nouveau rendue aux urnes en juin. Cette élection a permis au vainqueur d'obtenir 50 sièges supplémentaires sur les 300 que compte le Parlement. La ND a obtenu 40,6 % des voix, soit 158 sièges. Le principal parti d'opposition, la gauche radicale Syriza, a obtenu 17,8 % des voix.
Suite à ces développements, Mitsotakis a procédé à la formation d'un cabinet. On s'attend à ce que le gouvernement poursuive son programme en faveur des entreprises et ses réformes visant à moderniser l'économie. Bien que l'on puisse s'attendre à ce que le gouvernement réalise une grande partie de ces objectifs, les défis sont considérables dans un contexte de taux d'intérêt et de coût de la vie élevés.
La Grèce de Mitsotakis a considérablement renforcé ses liens euro-atlantiques. Un partenariat stratégique a été mis en place avec les États-Unis dans les domaines de l'énergie et de la sécurité. La Grèce a soutenu la réponse de l'UE à l'invasion de la Russie en Ukraine. Les relations avec la Turquie, membre de l'OTAN comme la Grèce, se sont améliorées après le tremblement de terre dans ce pays et les élections dans les deux pays. Mitsotakis et Erdogan, le Président turc, ont convenu d'une série de réunions pour régler les différends territoriaux de longue date.
Une croissance supérieure à celle de la zone euro
Après une contraction de 9 % en 2020, le PIB de la Grèce a augmenté de 4,8 % en 2021 et de 5,9 % en 2022. La récession a été plus profonde que dans la zone euro en moyenne (-6,6 %), mais elle a été suivie d'une reprise plus dynamique. Cela s'explique en grande partie par la réouverture de l'économie après les blocages et la forte réaction du secteur du tourisme. Les pertes de PIB ont été récupérées au début de l'année 2022. La crise énergétique a toutefois commencé à peser sur la croissance de la consommation au second semestre 2022, l'inflation atteignant un pic en septembre 2022, avec une moyenne de 9,3 % cette année-là.
La croissance économique devrait se poursuivre, mais à un rythme nettement plus lent. Les indicateurs du climat économique ont de nouveau augmenté en juillet, s'écartant de plus en plus de ceux de la zone euro, où ils ont chuté récemment. Les services, en particulier le tourisme, sont un moteur important ; la production industrielle est faible. La confiance des consommateurs augmente rapidement, sans que les récents incendies n'aient d'impact significatif sur le tourisme. L'expansion au deuxième trimestre a été modérée. Nous prévoyons une croissance du PIB de 1,5 % cette année et de 1,4 % en 2024, toutes deux supérieures à la moyenne de la zone euro (Graphique 1).
Graphique 1 : Croissance du PIB supérieure à celle de la zone euro
Les moteurs de la croissance grecque
Plusieurs facteurs viennent tendre cette prévision. Tout d'abord, en juillet, l'inflation a rebondi à 3,4 %. Cette légère augmentation n'est pas inquiétante car elle fait suite à la baisse notable de juin. L'énergie est désormais profondément déflationniste, tandis que l'inflation des denrées alimentaires est élevée (12,3 %). L'inflation de base descend lentement. À mesure que les effets de base favorables s'estompent, la trajectoire restante de l'inflation devrait être plus graduelle : 3,5 % en 2023 et 2,2 % en 2024 (Graphique 2). Le soutien à l'énergie par le gouvernement (à un coût de 4,1 % et 0,9 % du PIB en 2022 et 2023) atténue l'impact de l'inflation.
Graphique 2 : Baisse de l'inflation grecque
Deuxièmement, la dynamique du marché du travail est solide. Les données de juin montrent que le chômage a continué à baisser pour atteindre 11,1 %, avec une augmentation de l'emploi de 1,1 % en glissement annuel. Cette évolution devrait se poursuivre, les chiffres restant (largement) supérieurs à la moyenne de la zone euro en 2023 (Graphique 3). Les salaires réels ont cependant été touchés, diminuant de 4,7 % en 2022, les salaires nominaux ne compensant pas suffisamment l'inflation. Troisièmement, alors que la balance des comptes courants s'est fortement détériorée au cours des deux dernières années, la reprise est désormais en cours. Cela est dû à la baisse des coûts de l'énergie et à la reprise du tourisme. Au premier trimestre, le déficit est tombé à 3,5 % du PIB, niveau auquel il devrait se stabiliser (Graphique 4). Quatrièmement, la BCE ayant considérablement relevé les taux d'intérêt, un processus qui devrait maintenant s'estomper, les coûts d'emprunt ont considérablement augmenté. Cela exerce une pression importante sur les prêts bancaires (voir ci-dessous).
Graphique 3 : Le chômage, en nette amélioration, reste trop élevé
Graphique : 4 Amélioration de la balance courante après la crise
Des finances publiques à assainir
Après avoir, comme presque tous les autres pays, été durement touchées par la pandémie (déficits publics de 9,7 % et 7,2 % du PIB en 2020 et 2021 respectivement), les finances publiques s'améliorent. Ce redressement est indispensable compte tenu de l'augmentation du ratio de la dette au PIB, qui atteindra 206,3 % et 194,6 % en 2022 et 2021.
La croissance du PIB nominal due à une forte inflation et à des dépenses inférieures au budget signifie que le déficit s'est amélioré en 2022 (-2,3 %), ce qui est encore mieux que prévu. Le coût des mesures de soutien à l'énergie est resté inférieur de 3,8 milliards d'euros à l'estimation initiale (4,8 milliards d'euros), grâce à la baisse des coûts de l'énergie. Ces dépenses inférieures au budget sont le signe d'une prudence budgétaire constante, tout comme le financement de ces mesures par des taxes sur les bénéfices de l'énergie. Le ratio de la dette au PIB a également continué à baisser, pour atteindre 171,3 %. Les coûts de financement se sont stabilisés après avoir fortement augmenté conformément aux tendances mondiales. Les écarts entre les obligations d'État grecques et allemandes se sont réduits à 1,3 % en août, et sont même inférieurs à ceux de l'Italie (Graphique 5).
Graphique 5 : Les finances publiques doivent encore être assainir
Nous ne nous attendons pas à ce que cette prudence budgétaire et cette collaboration avec l'UE changent sous le gouvernement de la ND. Les soldes publics devraient se réduire progressivement pour atteindre -2,3 % et -1,5 % en 2023 et 2024 respectivement, et le ratio de la dette au PIB 165,5 % et 160,6 % respectivement (Graphique 6). Les besoins de financement devraient rester gérables dans les années à venir. Cela est dû aux échéances favorables et à la part importante de la dette grecque entre les mains des créanciers officiels. Le gouvernement dispose également de liquidités abondantes, avec 15 % du PIB détenus comme soutien à la trésorerie. Le risque de viabilité de la dette à court terme reste faible selon l'analyse de la Commission européenne. Les quatre principales agences de notation Standard & Poor's, Moody's, Fitch et DBRS maintiennent la dette publique grecque en dessous de la catégorie d'investissement, mais nous nous attendons à ce que cela change au cours de la période de prévision.
Graphique 6 : Écart de taux de la Grèce inférieur à celui de l'Italie
Les incertitudes du secteur bancaire diminuent mais ne disparaissent pas
Le tableau du secteur bancaire reste quelque peu mitigé. La rentabilité a augmenté grâce à la diminution des provisions pour pertes potentielles, à de nouveaux prêts plus rentables et à des gains commerciaux ponctuels. Cela a contribué à restaurer les positions en capital des banques, en particulier celles des quatre banques systémiques. Cependant, la qualité du capital de l'ensemble du secteur bancaire reste relativement faible.
Selon la Banque de Grèce, les prêts non productifs (NPL) ont continué à diminuer, atteignant 8,7 % du total des prêts en mai 2023, contre 8,8 % en 2022 (décembre), 12,8 % en 2021 et 30,1 % en 2020. Les titrisations soutenues par l'État dans le cadre du programme Hercules ont été un facteur clé de cette forte réduction, au même titre que la reprise économique. Malgré cette baisse considérable, voire spectaculaire, le chiffre reste le plus élevé de l'UE, et de loin. Comme le plan Hercule a expiré en octobre 2022 et que l'économie ralentit, le rythme de réduction des NPL se ralentit et devient plus difficile. Ce phénomène est atténué par le fait que les quatre banques systémiques devraient atteindre un taux de NPL de 5 % dans un avenir proche.
La croissance du crédit grec a commencé à se ralentir au second semestre 2022 et est tombée à zéro en juillet 2023. La demande des entreprises non financières ne suffit plus à compenser la baisse de la demande des ménages. Les deux secteurs souffrent de la hausse des taux d'intérêt.
Faire avancer la Grèce
Le gouvernement de la ND a un programme ambitieux pour faire avancer la Grèce, en poussant le PIB potentiel vers 2 % pour la période allant jusqu'à 2030 (2019-2020 : -1,9 %). Une collaboration étroite avec l'UE est en place. Le plan de résilience et de redressement (PRR) est particulièrement important, car il s'attaque aux défis de la transition verte et numérique, des compétences et de la cohésion sociale, de l'investissement privé et de la transformation institutionnelle. Il comprend 68 réformes et 106 investissements, soutenus par 17,4 milliards d'euros de subventions et 12,7 milliards d'euros de prêts (14,5 % du PIB en 2022).
La mise en œuvre du programme de réformes de la Grèce est en bonne voie. La Grèce a déjà reçu un total de 7,1 milliards d'euros pour deux demandes de paiement approuvées. Bien que prometteur, il reste des défis importants à relever, notamment en ce qui concerne l'importante charge administrative imposée aux autorités régionales et locales. Celles-ci ne sont pas connues pour leur forte capacité administrative.
Des progrès ont néanmoins été accomplis. La Grèce a déjà réformé la législation du travail, amélioré son système d'apprentissage tout au long de la vie et modernisé les services publics de l'emploi. Des réformes clés ont également été mises en place pour promouvoir l'investissement privé, qui s'est amélioré mais reste encore (très) inférieur à la moyenne de l'UE. L'investissement direct étranger est un élément important. Ils visent à renforcer la compétitivité de l'économie. Le problème de la petite taille des entreprises grecques est particulièrement pris en compte.
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